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Histoire d’un train qui cherche sa voie

Département de l'Allier
Histoire d’un train qui cherche sa voie : le Paris/Moulins/Clermont-Ferrand (1838-1938)
Emprunter le Paris/Clermont, c’est accepter l’incertitude. Le voyageur doit composer depuis bien longtemps avec l’âme buissonnière de ce train s’arrêtant de-ci delà, semblant hésiter sur la voie à suivre. Situation qui est prétexte à un retour sur la longue et complexe histoire de ce train !
Après de premiers projets esquissés vers 1838 pour relier Nevers à Brassac les Mines, la première bataille pour le Paris Clermont a lieu en mai 1842 à la Chambre des députés. Lors de la discussion de la loi fixant les itinéraires prioritaires à réaliser, connue plus tard sous le nom d’« étoile Legrand », se pose la question de l’itinéraire devant desservir le centre de la France depuis Paris. À ceux qui souhaitent en fixer le terme à Clermont-Ferrand s’opposent les tenants d’un axe vers Limoges et Toulouse. Se retranchant derrière l’absence d’études techniques disponibles au-delà de Bourges, le gouvernement fait adopter un itinéraire limité à cette ville et ajourne la discussion pour les cités situées au-delà. Premier d’une longue liste de reports et retards de décision concernant cette desserte.
C’est la loi du 26 juillet 1844 qui entérine le prolongement du chemin de fer du centre de Bourges à Clermont. L’itinéraire envisagé depuis Bourges passe par Le Guétin, Moulins, puis la rive gauche de l’Allier par Saint-Pourçain et Gannat.
Rebondissement en 1845 quand les élus nivernais proposent que venant de Bourges la voie passe à Nevers, remonte ensuite la rive gauche de la Loire puis emprunte la vallée de l’Abron par Gennetines pour rejoindre Moulins. Vives réactions dans l’Allier et le Puy de Dôme où l’on défend l’itinéraire plus direct par Villeneuve sur Allier. À l’automne 1846 décision est prise de retenir l’itinéraire direct et de desservir Nevers en antenne. Les travaux peuvent se poursuivre de Bourges à Moulins. Et le premier train Paris Moulins par Bourges circule enfin début mai 1853 !
Fait nouveau, au-delà de Moulins on assigne désormais une double vocation à la ligne : desservir Clermont mais aussi rejoindre Saint-Étienne et Lyon. Mais où fixer la bifurcation ? Sont en débat dès 1850 pour rejoindre Roanne un itinéraire direct depuis Moulins par Dompierre, Digoin et la rive droite de la Loire, un autre par Varennes et Le Donjon, et enfin une liaison depuis Saint Germain des Fossés. Cette dernière est choisie sous la pression conjuguée des élus et milieux économiques de Saint-Étienne et Clermont, plaidant pour la liaison la plus courte entre ces deux villes.
De ce fait la ligne vers Clermont doit renoncer au passage par Saint-Pourçain au profit de Varennes, la traversée de la rivière Allier s’effectuant donc à hauteur de Saint-Germain-des-Fossés pour rejoindre Gannat. On abandonne alors les premiers chantiers déjà engagés en rive gauche pour en ouvrir de nouveaux en rive droite. Et le train arrive enfin à Clermont-Ferrand le 7 mai 1855.
Après la déconfiture de la compagnie du « Grand Central », le « PLM » obtient en 1857 la concession d’une ligne directe de Paris à Nevers, qui est ouverte en septembre 1861. Le train Paris, Moulins, Gannat, Clermont abandonne la gare d’Austerlitz et le passage par Bourges au profit de celle de Paris-Lyon.
La féroce concurrence entre les compagnies ferroviaires incite le « PLM » à chercher à raccourcir encore le trajet entre le midi et Paris. En 1904, il propose que la ligne soit accélérée par une liaison directe entre Nemours et Cesson en coupant à travers la forêt de Fontainebleau. Le tollé est immédiat chez les défenseurs de la forêt et les peintres. Coup de théâtre en mars 1905 quand le ministre annonce l’abandon de ce projet au profit de la réalisation d’une liaison directe de La Ferté-Hauterive à Gannat par Saint-Pourçain sur Sioule pour raccourcir Paris Clermont. Il annonce aussi la réalisation de la ligne Vichy Riom, Vichy étant jusqu’alors desservie en antenne depuis Saint Germain des Fossés.
Mais les difficultés financières et la guerre retardent les chantiers. La ligne La Ferté Gannat n’ouvre ainsi que le 25 août 1932 ! Trop tard car, depuis l’été 1931, Vichy est relié à Riom. Et du fait de l’importance économique de la cité thermale c’est par Vichy que l’automotrice Bugatti assure à compter de 1934 la desserte rapide Paris / Clermont !
À partir de 1938, s’engage une autre étape de cette histoire, objet d’un billet à venir, celle du temps de la SNCF.
Jean-Luc Galland
Illustrations :
  • Affiche PLM automotrice Bugatti (openarchives SNCF)
  • Gare de Saint Germain des Fossés (archives départementales Allier)
  • Horaires du 9 mai 1853 (archives SEB-extrait de la presse locale)

Références et sources :

  • Fonds « chemin de fer Allier » des archives de la SEB (en particulier rapport de la commission d’enquête sur le tracé par l’Abron)
  • Presse nationale et locale, notamment le Moniteur universel pour le suivi des débats parlementaires (références précises peuvent être obtenues auprès de la SEB)