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Les anciennes halles de Moulins

Moulins
Dans son ouvrage « Moulins en 1460 », Marie Litaudon note qu’au XVe siècle, les halles de Moulins étaient un enclos à ciel ouvert ayant environ 20 toises de long soit 36 mètres, qu’elles s’étendaient entre deux rangées de maisons donnant les unes sur la rue de la Revenderie (actuellement rue François Péron), les autres sur la « rue qui mène de l’église Notre-Dame à la Grand’Place » (actuellement rue Grenier) (1). Elle précise en outre que du côté des halles, le premier étage de ces maisons reposait sur des piliers et de ce fait les bancs et les étals étaient à l’abri (2). Il ne restait donc qu’à peine deux toises soit 3,60 mètres de largeur pour circuler.
Elle termine sa description en indiquant que l’accès aux halles se faisait par trois portes ouvertes entre les maisons qui se rejoignaient au premier étage. À l’Est, une entrée donnait rue de la Revenderie. À l’Ouest, une autre entrée permettait de sortir rue Grenier et enfin au Nord, une dernière se trouvait face à l’église Notre-Dame.
Les bancs et étals des halles s’affermaient chaque année à la Saint Martin moyennant une redevance annuelle qui variait selon le genre de négoce. Parmi ces négociants il y avait des drapiers, des merciers, des épiciers, des tanneurs, des cordonniers ainsi que des vendeurs de toile, d’objet en fer, en bronze, en acier, en cuivre et en étain.
Au-dessus de la halle, du côté de la rue de la Revenderie, les logements étaient habités essentiellement par des marchands. Il en était de même pour ceux donnant à l’Ouest sur la rue Grenier. Il y avait cependant une exception : Thierry de Clèves, valet de chambre et chirurgien de Mgr le duc venait de faire construire un immeuble dont la robustesse de l’ossature à pans de bois lui a permis de traverser les siècles et de faire aujourd’hui l’admiration des amateurs de patrimoine ancien (3).
Au sud du quartier des halles se trouvait, séparé par une ruelle disparue maintenant, un groupe de maisons joignant la tour de l’horloge. Pour les Moulinois du XVe siècle, cette tour était le beffroi (appelé Jacquemart par la suite), symbole des libertés communales obtenues, le centre de ralliement à l’occasion des heures joyeuses ou graves de la cité. À cette époque, le haut du monument était différent de celui qui existe aujourd’hui : un clocher en ardoises surmonté d’une fine aiguille coiffait l’ensemble de la tour. Il abritait une cloche ornée des armes du duc, de la duchesse et de la ville. Cette cloche était reliée au mécanisme de l’horloge et à un sonneur articulé en fer peint. Ce fut le premier Jacquemart (4).
Depuis le XVe siècle, les halles de la ville que l’on vient d’évoquer, avaient remplacé des halles installées dans un vieil édifice qui fut démoli.
Les nouvelles halles ont fonctionné jusqu’à la terrible nuit du 20 novembre 1655 où le feu prit du côté nord, à peu de distance de la collégiale. Les halles furent dévastées en partie par l’incendie qui ne tarda pas à menacer tous les alentours. Il s’est dit que le feu a cessé lorsque la statue de la Vierge Noire a été présentée devant les flammes. Cependant, il avait eu le temps de détruire quatre maisons : deux, dans la rue de la Revenderie (rue François Péron, à l’emplacement actuel de l’Office de Tourisme) et deux rue Grenier. Il est difficile de déterminer dans quelle mesure toutes ces maisons ont souffert du sinistre, aussi bien celles du côté occupé par les marchands, rue de la Revenderie, que celles du côté habité par les bourgeois, rue Grenier. On suppose que les dégâts furent importants puisque le feu atteignit et détruisit la toiture du beffroi.
Mais Jacquemart allait renaître de ses cendres. Les Moulinois ne pouvant pas se passer d’horloge, firent diligence pour fondre une nouvelle cloche. Quant au sommet de la tour, l’aiguille élancée, sous l’influence du style de l’époque, fut remplacée par un couronnement doté d’une couverture en impériale et d’une haute lanterne octogonale.
De plus, il fut décidé, non pas comme avant, d’avoir un seul sonneur, mais une famille complète : le père, Jacquemart, la mère, Jacquette sonnant les heures, les enfants Jacquelin et Jacqueline sonnant les quarts et les demi-heures.
Malheureusement, en 1946, un second incendie accidentel vint détruire à nouveau le haut de la tour avec ses cloches et ses automates. L’ensemble fut reconstruit à l’identique, mais maintenant, seule la structure en pierre est ancienne.
De nos jours, l’implantation d’ensemble du quartier des halles et de Jacquemart n’a pas changé depuis le XVIIe siècle à part la suppression de quelques maisons proches de la cathédrale. La rue de la Revenderie et la Grand’ Place (rue François Péron et place de l’Hôtel de Ville) sont toujours longées par des commerces. Par contre, les rues Grenier et des Orfèvres, sauf l’immeuble de Thierry de Clèves (4), sont loin de refléter l’aspect qu’avait la ville à l’époque médiévale (pans de bois recouverts d’un crépi, façades sans caractère et nécessitant un ravalement).
Quant aux halles, elles n’existent plus. Seul, un espace entre deux rangées de maisons, sans issue aux extrémités, subsiste. Certains Moulinois l’ont nommé rue des Juifs !…(5). D’après l’état des rues de 1777, une rue des Juifs serait située plutôt au nord de la Collégiale vers la petite porte du château. Aujourd’hui tout a disparu.
Georges Chatard
Bibliographie
  • Marie Litaudon – Moulins en 1460 – Crepin-Leblond-éditeur – Moulins – 1947
  • Marie Litaudon – Moulins en 1660 – Les Imprimeries réunies – Moulins – 1961