Le 19 septembre 1870, suite à la capitulation de Napoléon III à Sedan, les prussiens assiègent Paris. Les liaisons avec la province sont coupées. Pour y remédier, les parisiens font décoller quelques ballons pour transporter entre autre des correspondances mais ce procédé est très aléatoire. Des pigeons voyageurs sont employés mais ils ne peuvent acheminer qu’une très faible quantité de messages.
Divers inventeurs recherchent une solution par voie fluviale. Le projet de faire circuler du courrier dans une boite hermétique focalise les espoirs. Une boule sphérique construite en zinc, munie d’ailettes latérales de nature à la faire avancer même au fond d’un cours d’eau est conçue par Mrs Delort, Robert et Vonoven. Creuse de 20 cm de diamètre, elle peut contenir entre 5 et 600 lettres dont le poids est limité à 4 grammes. On imagine qu’elle serait immergée dans la Seine peu avant Paris et récupérée par un filet barrant le cours du fleuve dans la capitale. Le système de boule est testé dans la Bièvre, il est jugé viable. La construction est lancée.
Le directeur des Postes propose d’écouler le stock de courrier en souffrance pour Paris. Il fixe rendez vous à Mrs Delort et Robert à Bordeaux où doit se replier la Délégation du Gouvernement, puis à Clermont Ferrand où les lettres devraient être centralisées. Mais suite à des problèmes administratifs de responsabilité engageant l’administration des PTT, les autorisations sont refusées. Les inventeurs ne se tiennent pas pour battus. Ils retournent à Bordeaux et après de terribles négociations, le décret autorisant l’emploi des boules est enfin signé. Nous sommes fin décembre 1870.
Le directeur choisit alors Moulins comme lieu de centralisation du courrier.
Un accord avec le gouvernement prévoit de faire passer le tarif de l’affranchissement de 10c à 1F dont 20 centimes seront reversés aux inventeurs. Les lettres devront porter obligatoirement la mention « Paris par Moulins Allier ».
Les premières boules remplies et scellées, Delort se met en route via Nevers pour les jeter à Bray-sur-Seine. Il en immergera ensuite à Thomery et à Sannois, se faufilant au travers des lignes prussiennes.
55 boules dites de Moulins seront confectionnées et mises à l’eau entre les 4 et 31 janvier 1871 date de levée du siège. Malheureusement aucune ne sera repêchée à Paris !
Quelques unes seront retrouvées au hasard d’inondation ou de travaux de dragage. 20 entre 1871 et 1882, puis 2 en 1910, 1 en 1942 à Melun, 1 en 1956 à Montrond et finalement la 25ème sera découverte le 6 août 1968 à Saint Wandrille (76). La plupart des courriers sont en bon état prouvant que le procédé était un modèle du genre.
Actuellement chaque lettre constitue un véritable trésor pour les philatélistes avec une côte de 1000 à 30.000€ !
Michel MORER