I – Introduction
Il est difficile de se rendre compte au XXIe siècle de l’aspect qu’avait l’ensemble des dépendances du château de Moulins, situé au sud de celui-ci, tant au XVe siècle qu’aux siècles suivants.
Seuls quelques vestiges et les plans établis par l’architecte Evezard au XVIIIe siècle permettent d’avoir une idée plus précise.
Pour faciliter la compréhension de l’évolution des lieux, François Voinchet, architecte des Monuments historiques, a superposé sur le plan d’Evezard, par des hachures, les constructions actuelles.
II – La Chambre des Comptes
Elle a été fondée en 1374 par le duc Louis II de Bourbon à Souvigny, mais transférée à Moulins en 1378. Un édit de François 1er, pris en 1531, réunissant le Bourbonnais à la Couronne de France, la Chambre des Comptes fut de ce fait supprimée.
A l’origine, elle était destinée à remplacer les clercs du Bourbonnais, trop peu nombreux et trop dépourvus de moyens d’action pour exercer un contrôle efficace sur les receveurs et officiers des finances du duché. Au début, les effectifs de la Chambre étaient modestes : un président, quatre conseillers-maîtres, trois clercs, un procureur, un huissier. Ils étaient recrutés parmi les bourgeois de la ville.
La Chambre des Comptes devint rapidement le centre de toute l’administration du duché du Bourbonnais et venait dans l’ordre des préséances immédiatement après le Conseil ducal. Elle comprenait plusieurs services et occupait plusieurs locaux.
Le seul vestige visible de cette institution est la salle des archives dite « archives de la voûte » dont l’étage était occupé par la Chambre du Conseil. (plan – cliché 1). Le cliché 2 montre le mur ouest de cette salle des archives qui limitait à l’Est un côté de la cour des civils. Le cliché 3 donne un aperçu de la voûte supportée par des nervures dont les retombées et les clés de voûte sont sculptées aux armes des Bourbon (cliché 4).
III – Le Bureau des Finances
A partir du rattachement du duché à la Couronne, les rois de France s’employèrent à implanter leur administration dans le Bourbonnais en créant plusieurs institutions sur le plan militaire, judiciaire et financier.
C’est sous Henri III que furent créés en France les Bureaux des Finances. Celui de Moulins le fut en 1587 grâce à l’influence d’Antoine de Laval. Il fonctionna jusqu’au 5 août 1751.
Composé de nombreux officiers : trésoriers de France, procureurs, avocats, greffiers, ils étaient chargés de recouvrer les impositions.
C’est au n° 15 de la rue de l’Ancien Palais que se trouve un immeuble construit en partie à l’emplacement de la cour du Bureau des Finances. L’entrée de cette cour est encore marquée par un portail dont le fronton est richement décoré de sculptures : on y remarque des lances, des trompettes, des étendards (cliché 5). Il pose cependant un problème. Le thème représenté indique plus un local destiné à entreposer des armes qu’un Bureau de Finances. Il est vrai que Sully avait octroyé un dépôt d’artillerie à Moulins en 1608, mais le lieu n’a jamais pu être déterminé. Il est fort probable que ce fut une promesse non tenue et que ce fronton a été sculpté en prévision de l’installation de ce dépôt puis réemployé pour l’entrée du Bureau des Finances.
Une fois le portail franchi, on arrive dans un espace qui était une partie de la cour du Bureau des Finances, mais ce dernier n’existe plus. Le muret doit être un reste de sa façade sur la cour (cliché 6). Le plan (cliché 7) indique deux escaliers côte à côte. Celui de gauche est celui qui existe encore, celui de droite devait monter à l’étage de ce bâtiment que les trésoriers de France durent abandonner en 1751 en raison de son mauvais état. Ils s’installèrent au couvent des Augustins où il ne restait plus que trois religieux.
IV – Le Présidial
L’Ancien Palais dont une rue et une place de Moulins rappellent le souvenir, comprenait, outre le Bureau des Finances, le Présidial, autrement dit le tribunal de justice et ses dépendances, créé au XVIe siècle.
Un dessin de Claude-Henri Dufour montre la façade occidentale d’un bâtiment qu’il mentionne « Palais de Justice » (cliché 8). Il s’agit du Présidial où se trouvaient la salle d’audience, les bureaux des greffiers et la prison.
Le plan (cliché 9) permet de situer cette façade avec la tour qui la flanque dont il ne reste que la base (cliché 10).
Comme leurs collègues du Bureau des Finances, les Conseillers du Présidial durent abandonner les murs croulants de leurs locaux le 15 février 1756 et s’installer eux aussi au couvent des Augustins.
V – Le corps de garde du château
Au n° 21 de la rue de l’Ancien Palais, autrement dit entre le Bureau des Finances et l’entrée du château (cliché 11) était le corps de garde avec sa tour flanquant le mur d’enceinte. Au XVIIIe siècle, ce dernier est devenu la demeure de l’huissier du garde-meuble.
VI – Conclusion
De toutes ces dépendances, que reste-t-il ? Des plans, quelques pans de murs. Si l’on ajoute le château proprement dit, dont une grande partie a disparu dans un incendie en 1755 et dont le reste non entretenu a dû, à part la Mal-Coiffée, être détruit au XIXe siècle, on peut affirmer que Moulins n’a pas su conserver ce que nos anciens avaient bâti. Quel dommage ! Notre château ducal aurait pu rivaliser avec les plus beaux châteaux des bords de Loire.
Georges Chatard